Acteurs au premier plan de la scène avant-gardiste américaine de la seconde moitié des années 70, les deux guitaristes défricheurs croisent le manche au sein du quartet Twins, avec John Zorn et Bruce Ackley (« Vision Ease », « School ») et en duo sur une face complète du premier album de Kaiser, Ice Death. Vingt ans après moults expériences excentriques et versatiles, ils ressortent leur panoplie de guitares pour une leçon buissonnière exemplaire à défaut d'être académique. Profondément marqué par l'approche transversale de Derek Bailey (une époustouflante « Letter To Derek ») et l'esprit tordu de Captain Beefheart (cf les rythmes bancals et les harmonies dissonantes de « Twilight in Duckburg »), leur langage rompt avec les préceptes des expressions musicales toutes faites sinon pour se jouer des clichés. Le cœur de l'inspiration, c'est d'abord l'instrument lui-même et sa palette d'effets utilisés jusqu'à l'outrance : pincements, frottements, glissements, claquage et détente, cordes malmenées et caisses secouées, résonances et gratouillis multiples, hachures et tricotages rythmiques, posés en variables et équations à multiples inconnus… Plus qu'un catalogue de techniques expérimentales, il s'agit d'établir de nouvelles connexions propres à réjouir les neurones, en introduisant de la logique dans cet imbroglio, en taillant la matière sous forme de multiples facettes assemblées en combinaisons alambiquées. Une maîtrise conditionnée par l'écoute intensifiée d'un dialogue ici en improvisation totale, et, de tous les duos de guitares de Chadbourne, celui ou la symbiose est la plus forte.
EG
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